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All the light we cannot see, la (mauvaise) série Netflix

Vendredi 27 octobre, une diffusion du premier épisode de la très attendue série "All the light we cannot see" (Toute la lumière que nous ne pouvons voir) était offerte au cinéma Vauban de Saint-Malo. 

Je vous avoue que j'en suis sortie profondément déçue. Je vous explique pourquoi :

 


All the light we cannot see est un ovni littéraire. Ecrit par Anthony Doerr, ce roman fut publié en 2014 et reçut le prix Pullitzer en 2015. 

Aujourd'hui, et depuis plus d'un an, la très grande majorité de mes clients américains l'ont lu et demandent à retrouver les endroits cités dans le roman quand nous visitons Saint-Malo.

 

En quoi le roman est-il exceptionnel ?

 

1) Il nous emmène dans le Saint-Malo d'avant-guerre, celui dont il ne reste aujourd'hui que 20 % des ruelles et édifices debout à cette époque. Essayer de retrouver les cheminements de Marie-Laure dans ce Saint-Malo partiellement disparu est un jeu intellectuel passionnant. 

2) Les faits historiques rapportés sont d'une vérité époustouflante. Anthony Doerr a travaillé 10 ans sur ce roman. J'ai relu l'ouvrage 4 fois (3 fois en Français, 1 fois en version originale) et je n'ai trouvé que des minuscules erreurs sans importance ! A ce niveau, le roman est donc un presque témoignage de la période 1940-1944. 

3) La trame du roman, l'histoire de Marie-Laure et de Werner, est passionnante, originale. Elle nous tient en haleine jusqu'au bout. Ces 2 personnages sont d'une psychologie incroyable mais les personnages secondaires également. On ne peut que se plonger jusqu'au cou dans leur drame. 

4) Enfin, la construction du récit, faite de retours en arrière incessants, nous perturbe un peu (je sais que certains n'ont pas aimé le roman à cause de cette construction) mais elle est brillantissime, apportant un dynamisme très particulier au récit, et nous liant plus fortement aux héros.  


En quoi la série est-elle décevante ?

 

L'affiche de la série en 4 épisodes indique clairement qu'elle est "inspirée" du roman d'Anthony Doerr. 

On s'attend donc à retrouver l'essentiel de l'ouvrage. Il n'en est rien. Il aurait fallu écrire "très librement inspiré". La série prend prétexte d'une pseudo-adaptation pour produire une série à succès qui est assez éloignée de l'esprit du roman.

De fait, tout ce qui fait le succès du roman est soigneusement évité dans la série :

1) On a du mal à retrouver Saint-Malo sur des images qui nous emmènent plutôt à Villefranche de Rouergue ! La rue où habite Marie-Laure (la rue Vauborel) se situait dans l'extension du 18ème siècle. Dans la série, la maison donne dans une rue médiévale.  

2) Là ou Anthony Doerr cale ses personnages sur un fond historique d'une vérité confondante, Netflix fait de l'à-peu-près, collectionnant les invraisemblances historiques. La plus évidente étant le clocher de la cathédrale de 1972, omniprésent à l'image. Les événements de la Libération se mélangent sans respect de la chronologie. 

3) Les personnages sont profondément modifiés, le scénario aussi, notamment pour ajouter des personnages nouveaux,  des scènes de violence (marketing oblige). Parmi les incongruités de la série, Werner est un garçon plus petit que la normale et malingre ; il a les cheveux blancs. Louis Hoffmann est un beau jeune homme en bonne santé et blond comme les blés ! Le personnage de Marie-Laure devient mélodramatique à l'écran  et raconte sa vie au micro de son émetteur radio. La boulangère/résistante au fort caractère laisse place à un boulanger débonnaire et dodu, etc, etc.  

Les modifications du scénario ne sont pas cohérents avec les personnes inventés par Anthony Doerr.  Ainsi, dans la série, Etienne, le grand-oncle, abandonne sa chère petite-nièce pour se cacher on ne sait où. Le personnage d'Anthony Doerr ne quitte Marie-Laure que contraint et forcé puisqu'il est pris dans la rafle du 6 août. 

4) Je ne peux pas juger de la construction du récit dans la série puisque je n'ai vu que le premier épisode. Je regarderai bien sûr les 3 épisodes suivants et je peaufinerai mon avis. 


L'adaptation cinématographique d'All the light we cannot see était inévitable, vu le succès du roman. Que ce soit Netflix qui s'en soit chargé, c'est évidemment dommage puisque la chaîne s'adresse à un public majoritairement composé d'adolescents et de jeunes adultes friands de sensations fortes. 


Anne-Isabelle Gendrot, le 28 octobre 2023 


Vous avez lu le roman ? Vous avez envie de suivre les pas de Marie-Laure dans les ruelles d'intramuros et de retrouver les endroits cités dans le roman d'Anthony Doerr ? 

Suivez la guide ! J'ai créé l'année dernière une visite guidée spécifique qui va vous replonger dans ce roman fascinant et vous donner envie de le relire sans attendre. 

A suivre sur la programmation des visites guidées ou à commander pour votre groupe (180 € jusqu'à 30 personnes maxi)

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